Je me souviens de mes difficultés

Je traîne ma tristesse et J.-E. me traîne comme un boulet. Il me dit que non, je ne suis pas un boulet. Je réponds : « Je n’insiste pas, n’en parlons pas longtemps, je te signale juste que j’ai conscience d’être chiant, ne crois pas que je ne le sais pas. » Il pourrait m’abandonner à mon sort, …

Les désirs ne coïncidaient plus avec les possibles

Il me dit que je suis beau. Je lui réponds que je le sais déjà, puisqu’il me l’a dit ce matin, au réveil. Il me dit aussi, plus tard, tout bas, au creux de l’oreille, comme pour me confier un secret, qu’il m’aime, et qu’il ne faut le répéter à personne. Et moi, je réponds : …

Ça ressemble à la fin de quelque chose

C’est l’histoire de la fin d’une histoire : je reviens au lycée Charles-de-Gaulle, où je suis venu souvent en 2020 et 2021. J’avais dit à Fred et Hélène que je serais partant pour refaire un truc : je n’hésite pas à dire aux gens que je cherche du travail. Je me suis dit aussi : « Faut que j’aille …

De photons qui s’agitent fort

Je parle très exalté, je prononce des phrases définitives sur ma conception de l’écriture et de la vie en général, des formules séduisantes, un résumé de mon rapport aux choses et aux gens, comme s’il avait lentement mûri à la faveur d’une quête philosophique, mais en vérité c’est improvisé. C’est le genre de choses que …

C’est poreux

« Et la dernière œuvre dont vous n’avez pas encore parlé, c’est vous », me dit-elle dans la cuisine après qu’on a traversé l’expo ensemble. Je ne sais pas si elle est ironique. Elle n’a pas l’air du genre à se moquer. Alors je réponds ça — parce qu’il me semble qu’elle a un peu raison, et …

Il n’y a pas de temps perdu

Pour aller au lycée de P. l’autre jour, j’ai pris de l’autre côté depuis la même gare. Un quart d’heure à pied. Là, pour le collège, ce sera vingt minutes dans la direction opposée. La gare s’appelle Épinay-Villetaneuse : logique. Il y a donc le côté de chez Jacques-Feyder (le lycée d’Épinay) et le côté de …

C’est cette chambre abstraite

« C’est l’endroit où je peux extérioriser mes émotions et me retrouver en moi-même », écrit-elle. Je lui demande si elle a conscience du paradoxe de sa phrase, elle me répond que oui, bien sûr. Il s’agissait de décrire de mémoire un espace familier, connu par cœur. En moins d’une heure, que faire de plus ? Là, au …

Je digresse et tu le sais

À G. qui me demande si je serai à la BNF cet après-midi, je réponds oui, mais pas à Tolbiac comme lui, plutôt à Richelieu : « parce que je préfère les ors, les boiseries, le luxe. » Bien sûr, il rebondit : « la luxure. » Mais non, il se trompe, il ne m’arrivera rien de ce genre, car …

Une présence unique éclaire la nuit

À l’emplacement de la rue des Batailles, après que toutes les maisons ont été rasées (celle où Jules a vécu, et puis l’usine Cail qui descendait jusqu’à la Seine), alors que la butte de Chaillot était toujours nue (esplanade vide où aucun des monuments envisagés n’a jamais été construit), au beau milieu des décombres du …

Ils ont été avalés par une poignée d’élèves

« Les écrivains ont toujours une écharpe et une tasse de café. » Il me dit ça, le môme, dans la cour de récré. Et le pire, c’est qu’il a raison : sorti de la salle des profs sans avoir fini mon café, je porte la tasse à la main. Et l’écharpe ! Rouge, en plus. Mais d’où sort-il …