La taille, oui, mais la durée compte aussi

De deux séductions, c’est celle du travail la plus forte : je décline une invitation à déjeuner, répondant que je suis à fond dedans, que je ne veux pas sortir du doux tunnel où je me suis engouffré moi-même. Ce n’est pas un prétexte pour éconduire l’ami, car je n’en ai pas besoin avec ceux qui …

J’explore, j’approfondis, je radote

J’avais vingt-et-un ans, c’était l’année des voyages : je n’avais rien demandé et la chose m’arrivait quand même. À l’époque, j’avais déjà compris que j’étais un petit gars chanceux, mais ce truc-là je ne l’avais pas vu venir : il y avait déjà ce départ en Pologne programmé, car dans mon école le séjour Erasmus était obligatoire …

« Splendeurs et misères des couturières », ou « Le pari des Rabot »

J’avais envie de romanesque, voire de rocambolesque : quelque chose de feuilletonnant. J’ai été servi par Un conte de deux villes. Quand je l’ai fini, H. m’a dit : « J’adore les scènes d’auberge, et aussi la description du salon glacial d’un aristo français » — il m’impressionne, il connaît tout. C’est le seul livre de Dickens que j’ai …

Une présence unique éclaire la nuit

À l’emplacement de la rue des Batailles, après que toutes les maisons ont été rasées (celle où Jules a vécu, et puis l’usine Cail qui descendait jusqu’à la Seine), alors que la butte de Chaillot était toujours nue (esplanade vide où aucun des monuments envisagés n’a jamais été construit), au beau milieu des décombres du …

Le lecteur a déjà l’image mentale

« Mon histoire, c’est cet acte de piratage : comment ils ont intercepté les communications de l’occupant. Mais pour ça, j’ai besoin de connaître en détail la configuration du pavillon où ils se cachaient, et tout le quartier alentour. » C’est Joachim qui m’explique ça, hier soir à la Maison de la poésie, à propos de Robert Keller …

Il faut dire qu’il est costaud

Je lui propose une terrasse de café dans le Marais. Il répond : « Ouais. » Enthousiasme modéré. Alors, va pour Montmartre : je prends le métro jusqu’à Château-Rouge — non, jusqu’à Marcadet, car je rate ma station — et je croise la rue Ramey, alors, forcément, je pense aux « années Montmartre » de Rue des Batailles, car je suis …

Je serais pour une littérature à bout portant

C’est de plus en plus évident, ça saute aux yeux, et je ne m’en cache pas : Jules, c’est moi — j’avais dit, plus tôt : « Maurice, c’est moi », mais ce n’est pas incompatible : je suis tous les personnages à la fois, je ne parle que de moi. Comment inventer la vie de gens qui ne sont …

Toucher le squelette, ce serait tout changer

Vu son ascendance (le père, militaire à quatorze ans, s’instruit sur le tard et devient vétérinaire dans sa vingtaine) et le parcours de ses aînés (le frère Camille est professeur de chimie au lycée de Nancy ; la sœur Caroline sort de la Maison d’éducation de la Légion d’Honneur, elle deviendra institutrice, son témoin de mariage …

Grâce à lui le bambino reste au sec 

Celui avec les pieds dans l’eau, qui porte le bambino sur ses épaules, c’est Christophe, mais je dis « Cristoforo » parce que je m’adresse à J. dans notre sabir bricolé : je commence une phrase en anglais puis, par paresse ou incompétence, je la termine en français ; et je lui parle italien par jeu, ou …

« Il y a un côté absurde », disent-ils

J’écris en roue libre depuis plusieurs semaines, sans relire ce que j’ai fait dans les jours précédents, ni me référer aux chapitres écrits l’année dernière. Avant de m’engouffrer dans n’importe quoi, ce serait bien d’y jeter un œil à nouveau ; avant d’aller trop loin dans le bizarre-pas-bizarre — cette bifurcation qui m’excite : ouvrir une brèche …