Je vais bien, très bien.
Ça y est, elle sait ! Hier midi, je l’ai dit à S*. J’avais plutôt le moral, donc le matin j’ai pris la décision de le lui dire. Ça m’a mis de bonne humeur. J’ai imaginé que, ce midi-là, comme tous les mercredis, on mangerait tous les deux. Des fois, il y a aussi B*. Alors je l’ai convaincu de rester, j’ai pensé que ça me donnerait du courage. Je me suis assuré que M* ne restait pas ; je ne veux pas qu’elle sache, je ne suis pas intime avec elle. Je me suis fait un petit scénario. Finalement, B* m’a lâché (il ne savait pas que je comptais sur lui). Du coup, je me suis dégonflé.
Tout compte fait, on a mangé tous les deux et, dans la discussion, ça s’est fait tout seul, naturellement. J’ai trouvé une bonne occasion pour le dire. Elle a très bien réagi. Un peu surprise, quand même ! Mais pas tant que ça, en fait… Depuis quelque temps, je lui avais quand même tendu des perches, j’ai laissé planer le doute pour m’amuser… sur un ton qui pouvait laisser croire, aussi bien, qu’elle avait de bonnes raisons de douter, ou de croire que je déconnais. Toujours est-il qu’elle sait, et que ça m’a fait du bien ! Je redoutais un peu, quand même, parce qu’elle a encore des préjugés sur certains sujets. Par exemple, elle pensait que, quand on est homo, ça se voit. Mais elle a fait d’énormes progrès. Il y a encore un an, c’est tout juste si elle ne considérait pas les homos comme des dépravés ou, du moins, comme des anormaux. On s’était engueulés à ce sujet, d’ailleurs, par exemple dans le cadre du débat qui a eu lieu à propos du mariage homosexuel – notez que je ne savais pas encore que je l’étais.
L’après-midi, sur MSN, j’ai dit à B* qu’ils étaient deux à savoir maintenant. Du coup, on a discuté un peu. J’ai beaucoup aimé. Ce type est très secret et, moi-même, je parle peu de moi. Cette fois, on a bien causé, c’était sympa. Un truc m’a surpris : il m’a dit que, lui aussi, il s’était déjà demandé s’il était homo – manière de « se démontrer par l’absurde qu’il était hétéro » (je cite). Ça m’a étonné. C’est original comme démarche. J’ai trouvé ça très bien. Mais il semble que ce ne soit pas si marginal que ça, puisque S* aussi (même elle !) m’a dit, aujourd’hui, qu’elle s’était posé la même question pour elle.
Voilà, je suis content. Ça fait du bien. Et puis, ça me rapproche d’eux. Pour se rapprocher de ses amis, rien de tel que de leur confier un « secret ».
Autre chose : je me suis remis en tête qu’Étienne me plaisait. Je ne sais pas si c’est vrai, ou si c’est plutôt cette idée qui me plaît ; toujours est-il que je me suis remis à y penser. Et ce n’est pas désagréable ! Ah, s’il savait que je le matais… D’ailleurs, j’ai été déçu : lui qui est toujours en short pour les cours de sport, eh bien, pas aujourd’hui.
Oui, j’ai repris le sport. Il faut que j’explique. Il y a un peu plus d’un mois, je me suis fait une entorse à la cheville en jouant au volley, pendant le cours d’EPS. Sur le moment, ça ne m’a pas fait très mal, je pensais m’être tordu la cheville, comme ça arrive parfois. Je me suis assis au bord du terrain en attendant que ça passe. Finalement, ça n’a pas passé. J’avais toujours mal, le reste de la journée. Et, quand j’ai dû rentrer chez moi : argh ! J’ai mis une demi-heure, alors qu’il me faut normalement dix minutes pour faire le trajet. J’ai sévèrement dérouillé. J’ai appelé maman en rentrant, et quand elle est revenue du boulot elle m’a accompagné chez le médecin. J’ai été dispensé de sport jusqu’aux vacances. Aujourd’hui, j’ai encore un peu mal. Alors j’ai hésité, ce matin, à reprendre le sport : j’ai eu peur de faire une bêtise, parce qu’une entorse mal soignée, et tu restes fragile toute ta vie ! Finalement, ça a été. Du côté de la cheville en tout cas. Pour le reste, le sport, c’est vraiment un calvaire. Je ne connais rien de pire. J’y vais à reculons, et c’est peu de le dire. La veille au soir, je commence à avoir une sorte d’angoisse et, le matin, c’est terrible pour aller au lycée. Heureusement, la journée commence par deux heures de philo – j’adore ça et mon prof est génial – et je pense à autre chose. Mais, juste après, il faut y passer. C’est horrible. Et c’est pire quand c’est un sport d’équipe, comme en ce moment avec le volley.
Cette rubrique « Carnets » reprend le journal que j’ai commencé à tenir en 2003. Dans ce carnet no2 (Angoisse du doute, malaise de la certitude, 15 juillet 2004 – 17 janvier 2005), j’ai seize ans.
Ce fameux moment où les premiers à être dans la confidence sont « surpris mais pas tant que ça »…
Toujours aussi plaisant de suivre Antonin le long de son chemin…