Dimanche : élections régionales, deuxième tour. Sur vingt-deux régions, vingt sont à gauche, c’est-à-dire toutes, sauf l’Alsace et la Corse. Grosse baffe pour Raffarin. Pourtant, il est toujours là. Plus de la majorité des Français veut le virer, et il est toujours premier ministre. Il a constitué un nouveau gouvernement, mais bon : en gros, il a repris les mêmes connards. C’est comme s’il n’avait rien fait.
J’ai l’air un peu virulent, mais c’est parce que je comprends de moins en moins comment les gens peuvent être de droite et avoir la conscience tranquille. Ils sont d’un égoïsme… ! J’habite au Pecq, je vais au lycée du Vésinet : il n’y a que des bourges autour de moi et ils sont tous de droite. Même mes copains. Ça me désespère. Même B*. Enfin, bon, lui n’a pas l’air très attaché à la politique, c’est déjà ça. Mais ça m’étonnerait qu’il se gauchisse du jour au lendemain. S*, elle, ce n’est même pas la peine d’essayer : famille de bourges cathos irrécupérables. W*, lui, n’a pas l’air de s’intéresser à la politique, je ne connais pas ses opinions – peut-être parce qu’il n’en a pas. M*, elle, n’y connaît rien : tout ce qu’elle sait, c’est qu’elle est de droite comme son père, qui est PDG. Il n’y a que Benoît qui soit socialiste (comme ses parents). Je le vois de moins en moins, d’ailleurs, et je ne sais pas pourquoi. Il ne vient plus à pied au bahut, alors on ne fait plus ce trajet ensemble. Le reste du temps, il est avec les potes de sa classe, et je ne les connais pas. Qui d’autre ? Aymeric, lui, est anarcho-syndicalo-socialo-trosko-marxisto-lénino-révolutionnaire, rebelle pro-tibétain. Bon. Qui d’autre ? Nabil ? L’an dernier, alors qu’on parlait de la grève des profs, il m’a répondu : « Eh, mais t’es gauchiste ou quoi ? » Ben ouais. Et je t’emmerde. Lui, il se la joue pauvre enfant d’immigré, pseudo-racaille de banlieue. Raté pour lui : il n’est qu’un petit bourge de Chatou, comme les autres. Qui d’autre ? Arthur et Gautier, dans ma classe, se la jouent anar, un peu comme Aymeric, mais je doute qu’ils le soient profondément. Ils se donnent un genre.
La semaine dernière, on a sorti le premier numéro du journal du lycée. Il y a des trucs pas terribles, mais ça va, c’est pas trop mal. Par contre, la BD est mauvaise. J’en ai fait une autre, je vais la leur donner pour le prochain numéro. Je ne sais pas qui est leur dessinateur actuellement, mais ce n’est pas un virtuose ! La planche que j’ai faite, je n’en suis pas entièrement satisfait : je l’ai fait lire, elle n’a pas cassé la baraque. Je m’en fous, je vais la leur donner quand même, ce sera toujours mieux que celle qu’ils ont publiée.
Cette rubrique « Carnets » reprend le journal que j’ai commencé à tenir en 2003. Dans ce carnet no1 (« Journal, 14 août 2003 – 15 juillet 2004 »), j’ai quinze et seize ans.