C’est à la fois le premier et le dernier vendredi 23 avril 2004 de l’histoire de l’humanité. J’ai seize ans, trois mois et treize jours, et plus jamais je ne revivrai ce que l’on vit à seize ans, trois mois et treize jours. Voilà qui est dit.
Hier, avec Juline et maman, on a vu Mariages ! au cinoche. C’était sympa. C’est drôle. À chaque fois, je garde les billets de cinéma ; enfin, ceux de Saint-Germain, parce que le titre du film est écrit dessus. Mais là, c’est dommage, le gars du guichet nous a donné des tickets avec Starsky et Hutch écrit dessus. Je ne peux pas le garder en souvenir.
Au fait : j’ai fini La disparition. C’est génial. Extraordinaire d’intelligence. Non seulement c’est un exercice très intéressant, mais le livre ne s’arrête pas là : l’intrigue est rusée, il y a du suspense, on se demande « Mais où veut-il en venir ? » On découvre les personnages un à un : Anton Voyl, Amaury Conson, Arthur Wilburg Savorgnan, Douglas Haig Clifford, Olga Je-ne-sais-plus-quoi (un nom compliqué, genre Mavrhokodratos). En fait, ils ont tous un lien de parenté ou une histoire commune. Tout est révélé à la fin. Tout le monde meurt, au long du bouquin. C’est très étrange. J’adore ! Quel génie, ce Perec (et non « Pérec », comme s’obstine à l’écrire la prof de français… alors qu’il explique longuement, dans W, l’origine de son nom…) Je me suis aperçu que c’était lui qui avait écrit la préface du livre de Gotlib (le recueil de la Rubrique-à-brac tomes 4 et 5 et Trucs-en-vrac tome 1), qu’on avait acheté ensemble avec papa. Ce livre a une grande valeur pour moi. La préface, pendant longtemps, je ne la lisais même pas, je la trouvais ennuyeuse. Je l’ai relue récemment : elle est très drôle. C’est un gros délire, mais sous un abord très sérieux. Je n’en comprenais pas encore les subtilités.
Cette rubrique « Carnets » reprend le journal que j’ai commencé à tenir en 2003. Dans ce carnet no1 (« Journal, 14 août 2003 – 15 juillet 2004 »), j’ai quinze et seize ans.