Mardi 19 juillet 2005

J’ai vu Adeline ce matin, sur les pelouses, comme la dernière fois. Puis il a commencé à pleuvoir, et nous sommes allés chez moi. Le temps d’arriver, il ne pleuvait plus. C’était la première fois qu’elle venait à la maison.

L’après-midi, j’ai été à Saint-Germain avec Juline. Elle est partie à La Défense ensuite, je suis rentré seul. Je n’ai rien acheté. Mais j’ai fait des croquis : la sortie du RER ; un fauteuil et une table du Soubise ; la vue du château. Pour le dernier chapitre de Sans titre (je n’ai toujours pas trouvé de titre à ma BD sur B*).

En sortant, ce matin, j’avais laissé les trente-quatre planches à Juline pour qu’elle les lise. À midi, elle m’a dit : « Je les ai seulement feuilletées, ça me gêne un peu, c’est très intime… je préfère les lire quand ce sera terminé. » Å bon.

J’ai changé d’avis : je ne montrerai pas ces planches à B*, car, pour cela, il faudrait que je puisse le voir, lui. Et ce serait une très mauvaise idée que de le revoir : depuis que je me suis mis en tête que j’allais le revoir, j’ai recommencé à me faire des films. Mais que me faut-il pour arrêter la machine ? La dernière fois, il m’a dit clairement que je devais l’oublier. Malgré ça, je n’ai toujours pas compris ? C’est dingue.

Comment ne plus être amoureux de B* :

  1. Faire comme si de rien n’était et attendre que ça passe → échec
  2. Lui révéler mes sentiments pour qu’il formule explicitement un refus → échec
  3. Éviter tout contact physique (y compris visuel) → c’est ce que je dois faire
  4. Éviter tout contact, y compris le téléphone, Internet, la poste, etc. → j’espère ne pas devoir arriver à cette extrémité
  5. Détruire toute trace de lui → pas question !

Pourquoi ne faut-il pas que je revoie B* ?

  1. Risque qu’il ne me dise rien → c’est donc moi qui parlerai → je vais raconter n’importe quoi, comme d’hab, et l’assommer d’ennui
  2. Ou bien, je lui parle de nous (car l’objet de cette hypothétique rencontre, c’est de lui donner cette BD) → risque de paraître insistant
  3. Si je lui montre ma BD, il comprendra que je l’aime depuis longtemps → risque de le décevoir ou de le choquer, parce qu’il pensera que nos rapports n’ont jamais été nets. Je préfère qu’il garde une bonne image de moi.

À Saint-Germain, devant le château, j’ai parlé avec Jean-Baptiste, un mec de ma classe avec qui je n’avais jamais parlé de toute l’année. Il m’a d’abord parlé par intérêt, ne nous leurrons pas (il me l’a dit lui-même) : pour se débarrasser de trois mecs qui le collaient. On a parlé du bac, bien sûr. Il ne l’a pas eu. Ils sont deux dans la classe à ne pas l’avoir eu. Finalement, il est peut-être sympa.

En rentrant à la maison, j’ai croisé ce type. Portrait. Il s’appelle Salim, je crois. Il est un voisin, ou un ex-voisin. Il bosse au marché, chez le primeur. Je le vois souvent là-bas. On avait l’impression qu’il était branché par Juline, mais ça fait des siècles qu’elle n’a pas été au marché. Résultat : quand j’y vais, moi, il lui est arrivé de me demander : « Elle n’est pas là, ta sœur ? » Plus récemment, il me fait de grands sourires (comme Juline n’est pas là, c’est moi qui ai droit aux sourires : chouette !) Je disais donc : je l’ai croisé dans ma rue tout à l’heure. Il m’a vu. Je lui ai souri. Il m’a dit : « Salut ! » Ah bon ? « Salut » ? C’est bien familier : ça m’a surpris. Ça m’a plu. J’ai considéré que mon sourire faisait office de salut, et je n’ai rien répondu. Il a mis son casque, il a enfourché son scooter, il est parti. Quelle aventure !


Cette rubrique « Carnets » reprend le journal que j’ai commencé à tenir en 2003. Dans ce carnet no5 (intitulé B*, 8 juin – 1er août 2005), j’ai dix-sept ans.

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