J’ai fait un rêve réaliste et transparent, comme à mon habitude. Un rêve à base de L*. En feuilletant un de ses carnets de croquis qu’il a laissé traîner, je vois un dessin explicite qui me fait comprendre sa love story avec K* (?). Il me demande de garder ça pour moi.
Autre rêve. B* y fait une apparition furtive. Il se tient tout près de moi, et me parle ainsi : « Cela fait longtemps que tu ne m’as pas donné de nouvelles… Qu’est-ce que tu deviens ? Pourquoi ne nous voyons-nous plus ? » En guise de réponse, je lui demande pourquoi lui non plus ne me contacte jamais s’il tient vraiment à entretenir notre relation.
Ce matin, je vais au lycée : c’est le « forum des anciens élèves », où nous sommes invités à présenter nos écoles ou nos filières universitaires aux élèves de première et de terminale. C’est l’occasion de revoir des têtes sympathiques. J’y vais avec S*, qui retrouve ses collègues de Daniélou : Camille et Julie. Je vois Amandine (je lui confie la lettre pour A*) et Lisa. Il y a aussi Benoît. Je vois les profs que j’appréciais : M. Abidi, Mlle Evin, M. Tartary.
Quand je pense « lycée Alain », c’est plus fort que moi, je pense : Florian. Comme je l’espérais, il est venu au forum. Il est en terminale. Il avait l’air content de me voir. Je pense qu’il m’aime bien.
Surtout… surtout… j’ai vu celui que je n’aurais jamais cru voir ici… quelqu’un que je n’aurais pas imaginé revenir un jour au lycée : j’ai vu B* !
J’ai commencé par penser qu’il valait mieux que je ne m’approche pas trop, que ce serait mauvais pour moi. J’étais très mal à l’aise. Puis, très vite, sa présence m’a fait le plus grand bien. J’ai retrouvé la relation que nous avions l’année dernière, dans ce même environnement. Nous avons causé un peu ; je crois qu’il est content de ce qu’il fait à présent. Il s’est fait des copains. En revanche, il ne voit plus personne du lycée (sous-entendu : M* non plus). Il va bien, et ça me fait plaisir. Nous nous sommes séparés comme les copains que nous étions, et que nous sommes.
S* persiste à penser que ce n’est pas bon pour moi de le revoir… Je lui ai expliqué que ça ne me faisait que du bien. Surtout, qu’elle n’espère pas que je l’oublie… simplement en ne le voyant plus ! Je ne l’avais pas vu depuis quatre mois, et je pense toujours à lui (rêve de cette nuit). Il a toujours une petite place à part dans mon cœur, mais à présent — je l’ai déjà dit — sa présence en moi est réconfortante ; elle n’est plus destructrice. Vivre cette relation infernale au quotidien, comme l’an dernier, c’était malsain. Penser à lui de loin en loin, comme aujourd’hui : c’est agréable.
Le 20 octobre 2005, je notais dans mon carnet rouge (celui où je dessinais) : « Je m’aperçois que ce garçon (que j’ai déjà repéré) porte une ceinture arc-en-ciel à six couleurs. Je me demande si elle a la signification que je lui donne, ou si ce n’est que décoratif… J’ai très envie de le lui demander, mais je ne le ferai bien sûr pas. » Depuis, à chaque fois que je croise ce garçon, je suis de plus en plus persuadé qu’il l’est. Évidemment, la ceinture ! Et j’ai l’impression qu’il m’a repéré. Et cet après-midi, je me suis connecté sur Rezo-G. Je n’ai toujours pas entamé de conversation (j’ai tendance à rembarrer tous les mecs qui m’abordent), mais j’ai parcouru les profils des membres… et sur qui suis-je tombé ? Un certain ***… qui dit qu’il est en première année de communication visuelle à Duperré ! Je regarde sa photo : oui, c’est bien lui ! Le type avec la ceinture arc-en-ciel.
J’ai ri, de voir sur Internet ce mec que je croise tous les jours à l’école. Mais en réalité, ça me fait peur. Est-ce donc une fatalité, quand on est homo, de s’inscrire sur ce chat ? C’est tellement petit… Tous les homos (le peu d’homos !) que je connais sont sur ce réseau : Florian (depuis deux ans), Alexandre (puisque c’est lui qui me l’a conseillé) et maintenant ce mec à la ceinture arc-en-ciel… Et je ne suis inscrit que depuis deux ou trois semaines ! Bientôt, je vais y retrouver un voisin, ou mes anciens profs ? Et puis : tous les mecs de Duperré, surtout ceux qui sont en style-textile. Marrant… mais un peu pathétique.
Cette rubrique « Carnets » reprend le journal que j’ai commencé à tenir en 2003. Dans ce carnet no7 (intitulé Vincent, Alexandre, Édouard et les autres, 29 novembre 2005 – 18 mars 2006), j’ai dix-sept et dix-huit ans.