« Bonjour madame, nous cherchons les petits hommes verts.
— Vous ne les avez pas trouvés ? Aucun ?
— Non. On a déjà fait le tour du village, pourtant. »
W. et moi sommes à Bessines, en Deux-Sèvres. À Bessines, il y a l’homme de Bessines. L’homme de Bessines n’est pas comme l’homme de Luçon (qui est, lui, un ancêtre hominidé vivant aux Philippines) : il s’agit d’une œuvre d’art de Fabrice Hyber — Fabrice Hyber étant, lui, un homme de Luçon, dans le sens où il est né à Luçon (mais en Vendée, pas aux Philippines). Cette œuvre consiste en une série de sculptures de petits hommes verts. On aimerait bien les voir, mais où sont-ils ?
« Il y en a un à l’espace Noisy, sur la rue des Trois-Ponts. Vous le trouverez à coup sûr », dit la femme. Une autre femme intervient : « Juste là, devant l’église, à l’entrée du cimetière, il y en a un aussi ! » Ah, bon. Nous leur disons merci, mesdames, et nous repartons à l’aventure.
Heureusement qu’il fait beau. On pourra dire, au moins, qu’on a fait une belle balade. On retourne à l’église, alors, qui est très belle, avec son chevet à colonnade, ses modillons tous différents. Mais, d’homme de Bessines, point. Aucune trace au sol ne suggère qu’une sculpture a existé ici récemment. Que s’est-il passé, chez cette femme, pour qu’elle ait vu un petit homme vert à cet endroit ? Étrange.
On reprend la voiture, en quête de l’espace Noisy. Quand on l’aura trouvé, on verra l’homme, c’est sûr. Mais ça ressemble à quoi, ce truc ? Bon, on va bien tomber dessus, car voici la rue des Trois-Ponts. Nos yeux guettent l’apparition d’une de ces choses architecturales qui porte le nom, souvent, d’« espace » : une salle polyvalente, un truc dans le genre. Rien. Alors, on s’arrête là, au bord de l’eau. Un enfant pêche. Un autre est perché sur un muret. Une sorte de clairière, où un chapiteau vient d’être démonté : c’est peut-être le fameux espace événementiel, et un petit homme se tiendra là, devant ? Non. Toujours rien. Je dis : « Et maintenant qu’on a quitté le village pour la forêt, trouver un homme vert là-dedans, ça fera ton sur ton, ça va être galère ». Car le décor, à ce moment, est un peu comme ça :
Il faut se rendre à l’évidence : nous sommes bredouilles. Nous avons parcouru toutes les rues, tous les chemins de Bessines. Nous avons parlé à des femmes, rencontré des enfants. Mais, aucun homme. Ni vert, ni d’aucune autre couleur. Et si les seuls hommes de Bessines, c’était nous ?
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