« Il est magnifique », « il est vraiment beau ». Ces compliments sont agréables à lire, parce que c’est de moi qu’il est question (le bébé de 4,3 kilos).
Je ne sais pas du tout qui sont Simone, Robert et Joëlle (Jouelle ?) et il est probable que je ne le saurai plus, car ce n’est pas à moi que la carte est adressée et que mes parents ne sont plus là pour me la lire et me renseigner. La carte a dû arriver chez nous il y a un peu plus de trente ans (j’en ai quasi trente-et-un), mais pas en janvier ni même en février 1988 : elle n’a pas été écrite de suite, nous dit l’écriture, à cause de l’angine. Peut-être en mars, alors. Ces trois-là, qui signent de la même main (celle de Simone, je parie) habitaient loin de Paris, dans un endroit où on ne trouve pas aussi facilement de bonnes choses pour le bébé (pour moi). Alors, si ça se trouve, nous ne nous sommes jamais rencontrés. À la date où cette carte a été écrite, il est même certain qu’ils ne me connaissaient pas : ils m’ont vu seulement en photo, ils se sont dit « il est vraiment beau » ; et ensuite, il se peut que rien d’autre ne soit arrivé, qu’ils ne soient jamais venus en région parisienne et que, moi, je n’aie jamais été là-bas (où ?).
Tout ce qu’ils ont su de moi, alors, aura été ceci : « il est vraiment beau ». Et ce n’est pas aujourd’hui que je leur donnerai tort.