Entre 1941 et 1946, il a existé une personne qui portait le nom de Buisson, qui habitait au 3, rue du Pas-de-la-Mule et qui lisait beaucoup. Il (ou elle) a emprunté cent-seize livres en cinq ans, soit environ deux livres par mois, à la bibliothèque municipale. Je le sais, j’ai son livret de prêt.
Le truc, c’est que je n’arrive pas bien à lire le nom (ou l’adresse) de la bibliothèque. Le tampon aux trois quarts effacé indique « place des » — j’ai envie de penser que c’est « place des Vosges », puisqu’il y a un grand 4 au-dessus, comme 4e arrondissement, et que la rue du Pas-de-la-Mule est à deux pas (de mule). Et, puisqu’il y a écrit également « Liste des musées de Paris », dois-je croire qu’il y a un rapport entre cette bibliothèque et un musée qui l’abriterait, par exemple la Maison de Victor Hugo ? Je le crois. Mais ce n’est que mon avis, vous n’êtes pas obligés de penser pareil.
Alors, le Livret de prêt. Que je vous explique. Chaque livre de la bibliothèque porte un numéro (le « numéro de l’ouvrage », je comprends bien ce que c’est, mais le « numéro d’ordre », c’est quoi ?). Le premier tampon indique la date à laquelle M. (ou Mme) Buisson a emprunté le livre. Le second, la date de retour. La durée du prêt est de vingt jours maximum (article 41 du règlement). Mais il y a des exceptions, notez : le livre 5039 a été emprunté le 23 novembre 1941 et rendu le 18 décembre, soit vingt-cinq jours plus tard, autrement dit vachement à la bourre. Je me demande si le bibliothécaire a râlé. Tout de même, c’était la guerre, il se passait des choses plus terribles à Paris. Peut-être qu’on pouvait relativiser, alors, la gravité de la faute commise par M. (ou Mme) Buisson.
Ce qui serait bien, c’est de trouver le catalogue de la bibliothèque, pour savoir à quels livres correspondent ces cotes chiffrées. Mais je ne le ferai pas. Une autre chose que je ne ferai pas, c’est mouiller mon doigt pour tourner les pages de mes livres. Il est écrit, dans le Livret, que c’est dangereux.
Alors, un conseil : ne le faites pas non plus.