J’explore, j’approfondis, je radote

J’avais vingt-et-un ans, c’était l’année des voyages : je n’avais rien demandé et la chose m’arrivait quand même. À l’époque, j’avais déjà compris que j’étais un petit gars chanceux, mais ce truc-là je ne l’avais pas vu venir : il y avait déjà ce départ en Pologne programmé, car dans mon école le séjour Erasmus était obligatoire …

Le désir qui cherche sa scène

Je n’avais pas remarqué tout de suite les pointillés : une rue brève, qu’il serait question de prolonger à travers les maisons, les jardins. Les lignes sont tracées par-dessus les blocs hachurés, des zones emplies de petits points irréguliers. Je vois ça sur les plans des années 1860. Je ne les avais pas remarqués car, …

La beauté du geste

Pourquoi j’ai aimé lire City of Glass. Parce qu’on me l’avait recommandé, évidemment, et parce qu’il y a des thèmes qui me plaisent là-dedans (la ville, les fantômes). Mais surtout parce que j’ai aimé la fin : le roman (qui ressemble à s’y méprendre à une enquête) se termine sans que l’enquête soit terminée. Des pistes …

Quatre chiffres, treize lettres

J’avais rendez-vous à Berkeley. Je savais qu’il vivait dans la région (in the Bay Area) depuis quelque temps. Peut-être même que je le savais déjà, la dernière fois que je suis venu ici ? Je suis certain que nous n’avions pas encore repris contact à ce moment-là, mais je ne me rappelle plus si j’avais déjà …

C’était le 4-Juillet à Cloverdale

Cette fusée gonflable qui atterrit pile sur le toit du poulailler. La pagaïe qui se répand dans le poulailler. Les canards qui paniquent aussi. Les pintades qu’on appelle, en anglais, poules de Guinée. Les cochons d’Inde qu’on appelle aussi cochons de Guinée (mais il n’y en a pas, de cochon d’Inde, chez R. et O.) …

Tequila (et ses croquettes)

Elle me dit que le bus arrive à moins cinq. Le chien aboie. Elle lui dit que ce n’est pas la peine d’aboyer, parce que je suis sympa. Il aboie quand même. Elle me dit : il voudrait que tu le caresses. En vrai, elle parle anglais, donc elle ne me tutoie pas, mais je …

Je me souviens de Pompéi

J’avais envie de voir Lands End. C’est un endroit fou. Son nom veut dire : la fin de la terre. Littéralement : le Finistère. C’est à la pointe nord-ouest de la ville, où les falaises tombent directement dans l’océan : un paysage farouche comme on ne croirait pas en voir dans une métropole, si proche de la densité, …

On est spectateur (et ça ne me plaît pas)

La première chose que j’ai remarquée : les barrières séparant le trottoir de la chaussée. Le public, d’une part, et les chars, d’autre part. J’ai dit naïvement à J. et J. : « mais comment fait-on pour rejoindre la marche ? ». Je n’avais pas compris qu’ici, ce n’est pas une marche, comme la Marche des fiertés à Paris (une …

Fier, quand même

« Marrant, tout de même, cette idée d’être fier de quelque chose qu’on n’a pas choisi d’être » : c’est une remarque idiote, évidemment, mais je l’entends parfois et, comme elle est idiote, elle mérite à chaque fois qu’on en cause, et plusieurs fois je l’ai fait (en causer). Et ces jours-ci, j’y réfléchis plus souvent que d’habitude, …

Torpilleur, touché

Je ne sais pas exactement ce que ce serait, « écrire pour les mômes ». L’un de mes livres est soi-disant pour les enfants – c’est Les bandits – mais, à l’origine, le texte, je l’avais écrit comme s’il était pour moi. J’imaginais qu’il serait lu par des enfants de mon âge, disons, de vingt-huit ans. Et …